Mensonge
Oui, je lui ai dit de ne pas avoir peur
Au fond de moi j’étais morte de trouille
Oui, je lui ai dit de faire confiance au chirurgien
Au fond de moi je doutais terriblement
Oui, je lui ai dit : on a fait le bon choix
Au fond de moi, je ne savais plus
Oui, je lui ai dit que les risques étaient minimes
Au fond de moi je savais qu’il risquait sa vie
Oui, je lui ai dit qu’un an en centre de rééducation c’était rien
Au fond de moi je savais bien que j’aurai tellement souffert d’y laisser mon enfant
Oui je lui ai dit un an plus tard : quelle belle réussite, il remarche
Je n’ai pas osé lui dire que ce serait sans doute éphémère
Parce qu’une mère a besoin d’espoir
Je crois à la nécessité du mensonge, du non dit.
consigne: mensonge
La première fois
La dernière fois que j’ai pris l’avion
Pour la première fois
J’ai réalisé que peut être
L’avion pourrait s’écraser en mer
La dernière fois que j’ai mangé
Du thon rouge grillé
Pour la première fois je me suis dis
Que cette espèce pourrait disparaître
La dernière fois que j’ai enterré une amie
Pour la première fois, j’ai réalisé
Combien la vie était courte
La dernière fois que j’ai embrassé ma mère
Je me suis dis pour la première fois
Qu’un jour ce serait le dernier baiser
Et que je ne le saurai même pas
Consigne: la première fois
jacques Prévert : Pour toi mon amour
J'aime retrouver au hasard de mes balades sur le net
des poèmes appris il y a bien longtemps
et que je trouve toujours aussi beaux,
je crois que j'aime bien Prévert!
Je suis allé au marché aux oiseaux
Et j'ai acheté des oiseaux
Pour toi
Mon amour
Je suis allé au marché aux fleurs
Et j'ai acheté des fleurs
Pour toi
Mon amour
Je suis allé au marché à la ferraille
Et j'ai acheté des chaînes
De lourdes chaînes
Pour toi
Mon amour
Et puis je suis allé au marché aux esclaves
Et je t'ai cherchée
Mais je ne t'ai pas trouvée
Mon amour.
(Jacques Prévert)
Avoir ou être
Histoire certes un peu ésotérique mais qui donne à réfléchir....
Qui êtes vous?
Une femme était dans le coma et se mourrait.
Elle eût soudain l'impression qu'on l'amenait au ciel et qu'elle se trouvait au lieu du jugement.
- Qui êtes-vous?" demanda une voix.
- Je suis la femme du maire, répondit-elle.
- Je ne vous ai pas demandé de qui vous êtes la femme, mais bien qui vous êtes.
- Je suis la mère de quatre enfants.
- Je ne vous ai pas demandé de qui vous êtes la mère, mais bien qui vous êtes.
- Je suis maîtresse d'école."
- Je ne vous ai pas demandé qu'elle est votre profession, mais bien qui vous êtes.
Et cela continua ainsi, quelque fût sa réplique, elle ne semblait pas fournir de réponse satisfaisante à la question .
- Qui êtes-vous?
- Je suis chrétienne."
- Je ne vous ai pas demandé votre religion, j'ai demandé qui vous êtes.
- Je suis celle qui est allée tous les jours à l'église et qui a toujours aidé les pauvres et les miséreux.
- J' ai demandé non ce que vous avez fait, mais qui vous êtes.
Elle a manifestement échoué à l'examen,
puisqu'on l'a renvoyée sur terre.
Quand elle se remis de sa maladie,
elle décida de découvrir qui elle était.
Et cela fit toute la différence.
Le vin
Il savait que ce serait son dernier anniversaire
Nous étions tous là pour fêter ses 80 ans
Au dessert il nous a servi une vendange tardive
Douceur sucrée, nectar sublime
Qui nous a réchauffé le cœur
Depuis, chaque fois que j’ai l’occasion
De boire un verre de ce délice
Une belle émotion m’envahit et
Je pense à toi papa.
consigne: le vin
Leçon de piano Suite, 2éme prof!
Coup de sonnette.
Elle arrive, chignon bien placé, sourire rivé aux lèvres, cartable cuir étroit pour partitions et méthode de solfège.
Jeudi d’enfer, jeudi pourri, prostrée au fond de la chambre, regard vide…absence…d’abord aux autres apprentis musiciens l’honneur de décliner leurs gammes.
Ne plus exister, roulée en boule sur le lit, pouce dans la bouche,
sourde, muette…ailleurs.
La porte s’ouvre, les pas résonnent. C’est mon tour.
Le temps ne s’est pas arrêté…
Maitriser les battements de ma rage. Se redresser, traverser le couloir, tête baissée, même pas bonjour.
Les portées valsent devant moi.
Chanter….nœud dans la gorge, chanter, oui mais que du faux, que du grave, du bourdon qui bourdonne à ses oreilles .Elle se fâche….on passe aux gammes… doigts qui courent en désordre sur le clavier, tout en vrac, pieds trop raides pour pédales trop loin, taper de plus en plus vite, de plus en plus fort des blanches, des noires, en rafales, en saccades et soudain pousser un hurlement, un déchirement.
Elle a eu peur, tant mieux. Affolée maman jaillit…
Punition…roulée en boule dans mon lit, pouce dans la bouche, endormie…ailleurs.
la leçon de piano
Do ré mi
Je déteste les gammes
Pas si fa si le
Je me souviens, j’ai à peine dix ans, avec Mimi ma sœur, main dans la main, nous allons traînant le pas de la place du peuple à la rue des creuses, notre cartable à partition à bout de bras. Deuxième étage d’un vieil immeuble aux marches grinçantes, nous retenons notre souffle déjà écœurées par les effluves de soupe, de pisse de chat, de renfermé, nous sonnons chez Marinette Pécoud, virtuose de l’orgue du grand temple, elle est notre professeur de piano. Je la déteste, elle et sa vieille mère qui dodeline de la tête, assise dans la cuisine, elle et ses gros chats qui déboulent de nulle part, elle et ses notes de musique.
Dans un salon tellement sombre trône le piano, tabouret à vis, j’entame mes gammes, mes doigts accrochent les notes, dérapent entre les dièses et les bémols, je n’ai pas l’oreille musicale, je chante faux, je n’aime pas le solfège. Un énorme matou installé sur le piano me fusille du regard, il a de l’oreille lui…elle, Marinette tient à la main une baguette en bois, spéciale fausses notes, je la déteste. Mozart, Schumann et les autres je n’aime ni vos rondos, ni vos valses, ni vos mélodies, ni même vos rigaudons. Je déteste le piano et Marinette.
Mimi à son tour fait ses gammes, soumise comme moi à l’envie de notre père de nous donner une culture musicale, ses parents lui avaient imposé le violon, il pensait que le piano serait plus facile à apprendre.
Et te souviens tu Mimi de notre terrible peur sur le chemin du retour, ce petit chinois, tirant une carriole, qui nous suivait, tous les jeudis de la rue des creuses jusqu’à la place du peuple !
consigne: quelques notes de musique
la part d'ombre
Derrière mon mur
Je sombre
A l’ombre
De mon ombre
Je me décolore
A la lueur
De mes nuits blanches
Je flanche
Je me débranche
Sous une avalanche
De peurs
Vous ne verrez rien
Je joue à cache-cache
Les yeux fermés
Avec moi- même
Pour vous je brille
Je maquille
Je sautille
J’étincelle
J’excelle
consigne: la part d'ombre , que j'ai choisi aussi décalée!